Georges
Luquet (1876-1965), membre du Grand Orient de France et Grand Chancelier
d'Honneur de son Suprême Conseil, le Grand Collège des Rites, était un
historien compétent. Il fut l'auteur d'un excellent livre, publié en 1963, La Franc-Maçonnerie et l'État en France au XVIIIè siècle. Il fut
aussi l'un des premiers historiens maçons après Albert Lantoine (1869-1949),
à rechercher dans les gazetins[i]
de l'époque, mais avec davantage de souci pour l'exactitude que son prédécesseur,
des témoignages contemporains sur les débuts de la Franc-Maçonnerie en France
et à Paris.
Il
découvrit dans la bibliothèque du Grand Collège des Rites, à une date indéterminée,
un rituel manuscrit pour lequel il rédigea une présentation et dont il
effectua une transcription dactylographiée.[ii]
C'est ce rituel que nous présentons aujourd'hui à nos lecteurs. Il s'agit
probablement du plus ancien rituel manuscrit français des trois grades de la Maçonnerie
symbolique. Avant d'en montrer l'intérêt, tentons de le replacer dans un
contexte plus général.
PROGRÈS
RÉCENTS DES HISTORIENS DE LA FRANC-MAÇONNERIE
1.
Les îles britanniques.
Depuis
un peu plus d'un siècle, nos Frères anglais ont fondé une Loge de Recherche, Quatuor
Coronati No. 2076, dont les membres s'attachent à étudier l'histoire de la
Franc-Maçonnerie en se basant principalement sur les documents. L'histoire des
débuts de la Franc-Maçonnerie anglaise est désormais assez bien connue grâce
à eux et à leurs publications qui comprennent non seulement des documents
officiels - par exemple les premiers procès-verbaux de la première Grande
Loge, de juin 1723 à septembre 1758 -, mais encore une grande partie des
manuscrits maçonniques et des documents profanes touchant à la Franc-Maçonnerie
anglaise de cette époque.
Ainsi,
dans un volume devenu classique, The Early
Masonic Catechisms (1943), nos collègues Knoop, Jones et Hamer, ont
scrupuleusement transcrit le texte de la vingtaine d'instructions maçonniques
de langue anglaise, manuscrites ou imprimées, dont l'existence est connue pour
la période 1696-1730.[iii]
Le
mot catechism [iv]
s'explique par le fait que ces textes incluent une série de questions et de réponses
qui constituent des instructions orales, fort semblables dans leur forme aux
petits "Livres" que nos lecteurs connaissent. Le plus élaboré et le
plus célèbre est Masonry Dissected
(La Maçonnerie Disséquée) de Samuel Prichard, ouvrage publié le 20 octobre
1730 à Londres, qui connut jusqu'en 1787 [v]
de nombreuses réimpressions et traductions.
Ceux
qu'intéressent les problèmes que posent ces documents dont certains sont
d'origine écossaise, se reporteront aux trente pages de l'introduction placée
en tête de l'ouvrage de Knoop, Jones et Hamer, en tenant compte du fait que ses
trois co-auteurs étaient anglais. Dans un livre récent (1988), David
Stevenson, un non-maçon, lecteur à l'université de St. Andrews, a remis en
question la prédominance de l'Angleterre sur l'Écosse, en ce qui concerne
l'importance à accorder au contenu et à la signification historique de ceux de
ces textes maçonniques qui sont antérieurs à 1723, prédominance qui n'avait
guère été mise en question avant lui.[vi]
2.
La France.
En
ce qui concerne les débuts de la Franc-Maçonnerie française, soit la période
qui recouvre les activités de la première Grande Loge de France [vii]
et s'arrête lorsque le Grand Orient de France fut fondé en 1773, nos
connaissances ont fait d'importants progrès depuis la publication du livre de
Luquet en 1963.
C'est
en 1965 que fut publiée anonymement la transcription (effectuée par Daniel
Ligou) du plus ancien registre parvenu jusqu'à nous des procès-verbaux d'une
loge parisienne, la loge du bijoutier Coustos, qui se tenait “à la ville de tonnerre dans la rue des boucheries faubourg saint
germain” à Paris. Ce registre commence le 18 décembre 1736 et se termine
le 17 juillet 1737.[viii]
Autre
auteur à avoir retrouvé et commenté avec pertinence de nombreux documents inédits
de cette période, Pierre Chevallier, dont les deux premiers livres, Les
Ducs sous l'Acacia (1964) et La Première
Profanation du Temple Maçonnique (1968) sont infiniment plus détaillés à
cet égard que sa remarquable Histoire de
la Franc-Maçonnerie française (1974-1975).
Les
livres et les articles de M. Alain Le Bihan, parus entre 1966 et 1981, ont fait
progresser de manière considérable nos connaissances sur le 18ème siècle.
Grâce
aux manuscrits découverts entre les deux guerres par le F...
Sitwell dans les archives de l'Anglaise
No. 204 de Bordeaux, documents transcrits et commentés par lui mais, à la
suite de son décès en juin 1931, restés pratiquement inconnus en France
jusqu'à ce que je retrouve originaux et transcriptions dans les années
1970-1990,[ix]
un certain nombre de problèmes fondamentaux, portant notamment sur les débuts
de l'Écossisme français, ont pu être éclaircis.
Enfin
les événements parisiens de la décennie 1760-70 sont devenus compréhensibles
depuis la découverte et la publication du Mémoire
Justificatif (1773) de Brest de la Chaussée.[x]
Depuis
une trentaine d'années, les historiens de la Maçonnerie française se sont
surtout attachés à préciser les "événements" maçonniques des années
1725-1773, dont le déroulement était encore mal connu. Faute de documents, l'élément
rituel a moins retenu leur attention.[xi]
Si tant est qu'un rituel au sens moderne du mot - question que nous aborderons
dans le paragraphe suivant - ait alors existé en France, on ne semble pas en
avoir imprimé le texte comme on le fait de nos jours, et nous ne savons rien
des cérémonies maçonniques françaises avant 1737.
Par
contre, au cours de la quinzaine d'années suivante, plusieurs brochures
parurent en français, qui prétendaient dévoiler "le secret" des
Francs-Maçons, la manière dont s'effectuait la "réception" des
nouveaux membres de l'Ordre et les thèmes d'autres grades. Dans un volume paru
en 1971, Harry Carr, alors Secrétaire et Rédacteur en chef de la revue
anglaise Ars Quatuor Coronatorum, a réuni douze de ces textes, imprimés
entre 1737 ou 1738 et 1751. Malheureusement pour les lecteurs de langue française,
ces documents ne furent publiés qu'en traduction anglaise.[xii]
Quelques-uns ont été reproduits en France ou en Suisse, ces dernières années,
en fac-similé.([xiii])
Depuis
que ces textes anglais et français ont été publiés, certains historiens ont
fait remarquer qu'il était difficile d'apprécier le degré d'authenticité
qu'on pouvait leur accorder, dans la mesure même où, si ces textes ne
constituaient pas le fruit pur et simple de l'imagination de leurs auteurs
respectifs, ils ne pouvaient alors avoir été écrits que par des Maçons qui
n'auraient pas respecté le serment prêté lors de leur initiation.[xiv]
Toutefois,
en ce qui concerne les catechisms de
langue anglaise (les premières instructions imprimées en français n'ont pas
d'ancêtre manuscrit connu), la comparaison entre certaines versions manuscrites
antérieures à 1723, considérées comme vraisemblablement authentiques, et les
versions imprimées après cette date, permet de constater que certains membres
de ces deux familles de textes présentent entre eux davantage que de simples
affinités et que par conséquent le témoignage qu'ils apportent ne peut être
négligé.
QU'EST-CE
QU'UN RITUEL MAÇONNIQUE ?
Tel
que nous entendons ce mot aujourd'hui, un rituel maçonnique comprend les
paroles prononcées et les actions effectuées par les membres d'une Loge au
moment d'ouvrir et de fermer leurs travaux, et lorsque l'initiation ou un grade
maçonnique est conféré.
Aucun
des catechisms manuscrits ou imprimés
en langue anglaise, antérieurs à 1760,[xv]
ne constitue un rituel au sens précédent. Lorsqu'ils reproduisent un dialogue,
le but de celui-ci n'est que de vérifier la qualité maçonnique d'un
interlocuteur auquel on demande de communiquer certains mots (pour les plus
anciens de ces catechisms, "le
Mot de Maçon"), de reproduire certains signes ou de décrire certains
instants spécifiques vécus par lui au moment de son initiation.
Les
plus anciens textes français connus qui, à partir de 1738, prétendent décrire
la cérémonie de "réception", utilisent pour ce faire le style
narratif. Par exemple, le premier texte français de cette famille, Reception d'un Frey=Maçon, commence ainsi:
Il
faut d'abord être proposé à la Loge comme un bon Sujet, par un des Freres,
sur sa réponse, l'on est admis à se présenter, le Recipiendaire est conduit
par le Proposant, qui devient son Parain, dans une des Chambres de la Loge, où
il n'y a pas de lumiere, & où on lui demande s'il à la vocation d'être reçû,
[...] [xvi]
Ce
que nous appelons aujourd'hui rituel, existait-il déja alors en France ou en
Angleterre ? On peut se poser la question en relisant par exemple Le Secret des Francs-Maçons (1744).[xvii]
On
croiroit d'abord que fermer une Loge désigneroit que la porte en doit être
bien close ; c'est tout le contraire, lorsqu'on dit que la Loge est fermée,
tout autre qu'un Franc-Maçon peut y entrer & être admis à boire et
manger, & causer de nouvelles. Ouvrir une Loge en termes Francs-Maçons
signifie qu'on peut parler ouvertement des Mystères de la Maçonnerie & de
tout ce qui concerne l'Ordre, en un mot, penser tout haut sans appréhender d'être
entendu d'aucun profâne (c'est ainsi qu'ils appellent ceux qui ne sont point de
la Confrérie.) Alors personne ne peut entrer, & s'il arrivoit que quelqu'un
s'y introduisît, on fermeroit la Loge à l'instant, c'est-à-dire, qu'on
garderoit le silence sur les affaires de la Maçonnerie.[xviii]
Comme
on ne trouve ici, et pas davantage dans d'autres textes sensiblement
contemporains, aucune allusion à une ouverture rituelle en forme de dialogue,
on peut se demander si, jusque dans les années 1740, les travaux d'une loge
n'auraient pas simplement commencé au moment où le Maître prononçait des
mots tels que "A l'ordre, mes Frères", vraisemblablement accompagnés
de coups de maillet.[xix])
Dans cette hypothèse, ce n'est qu'ensuite que l'ouverture formelle, telle que
nous la connaissons aujourd'hui, aurait été progressivement élaborée en
s'inspirant des très anciennes questions qui, originellement, ne servaient qu'à
vérifier la qualité maçonnique d'un inconnu. Ces questions, accompagnées de
leurs réponses-clefs, étaient entretemps devenues des "Instructions"
dont certaines nous sont encore familières. Par exemple : “Etes-vous Franc-Maçon
? - Mes Frères me reconnaissent comme tel” ou bien : “Où se tient votre Maître
? - A l'Orient - Pourquoi ?” etc.
INTÉRÊT
ET DESCRIPTION DU MANUSCRIT TRANSCRIT PAR LUQUET
Le
manuscrit transcrit par Luquet constitue à mon avis un document unique dont
l'intérêt exceptionnel peut être résumé par les trois caractéristiques
suivantes :
Il
reproduit le dialogue échangé au moment de l'ouverture et de la clôture de la
Loge pour les trois grades, ainsi que certaines parties concernant l'initiation
et les augmentations de salaire, ce qui en fait le plus ancien rituel (au sens
moderne du mot) connu de langue française.
Les
mots "sensibles" y sont tracés au moyen de l'un des chiffres maçonniques
de l'époque et, fréquemment, ces mots ou d'autres ne sont indiqués qu'au
moyen d'une lettre initiale, chiffrée ou non. Il semble que cette technique
n'aurait guère été employée si le scripteur de ce texte avait été un Maçon
parjure, ayant l'intention de le confier à un imprimeur pour se faire de
l'argent
Enfin,
on va le voir plus loin, la manière dont ce manuscrit a été composé semble
indiquer qu'au cours de son élaboration des renvois lui ont été incorporés,
"comme si" des ajouts y avaient été introduits au fur et à mesure
que des modifications ou innovations rituelles parvenaient à la connaissance de
son auteur.
Laissons
maintenant Luquet décrire lui-même ce manuscrit.
Le
manuscrit se compose de deux cahiers ou fascicules cousus ensemble, le premier
de 20 feuilles doubles, le second de 10 feuilles doubles, soit au total 120
pages de 17 x 25 cm. La première page du premier cahier sert de couverture et
porte le titre, entièrement écrit en hiéroglyphes :
LE
VRAI CATECHISME | DES FRERES | FRANCS-MAÇONS | REDIGE SUIVANT LE CODE |
MYSTERIEUX ET
APPROUVE | DE TOUTES LES LOGES JUSTES ET
REGULIERES
Au-dessous
est le dessin d'un niveau contenant dans son triangle, en hiéroglyphes, le mot
MAÇO | NS. Tout au bas de la page est laissé blanc un champ correspondant à
celui où sont inscrits, dans les titres des livres, les lieu et date de
publication. Entre la couverture et la première page du texte sont brochées
dans le cahier deux feuilles simples, soit 4 pages, non paginées, débutant par
le titre : Idée du but de la Maçonnerie.
Viennent
alors 32 pages numérotées de 1 à 32, débutant par le titre : Grade
d'Apprenti | Ouverture de LOGE, et contenant les grades d'Apprenti (p.1-12), de
Compagnon (p. 13-20) et de Maître (p. 21-32). Elles sont suivies de 6 pages,
paginées, débutant par le titre : Histoire de la | MAÇONNERIE [xx] | pendant que le | RECIPIENDAIRE | est dans le
TOMBEAU. Le verso de la page 5, paginé par erreur 4, au lieu de 6, porte comme
titre : Ordre ou Langage des | Banquets. Suivent 30 pages de Renvois, numérotées
de 1 à 32, la pagination sautant par erreur de 6 à 9 (il ne peut s'agir d'une
feuille enlevée après coup). Quelques-unes de ces pages sont restées
blanches, partiellement ou même totalement. Viennent ensuite 4 pages non numérotées
et restées blanches, sauf, en tête de la première, le titre : Renvoi
historique. Puis 10 pages sans pagination, dont la première est intitulée : Préparation
d'une LOGE | DE MAITRE, terminent le premier fascicule. L'avant-dernière de ces
pages ne contient que 4 lignes d'écriture, et la dernière, au verso de la précédente,
est entièrement blanche.
Le
second fascicule n'a, d'un bout à l'autre, aucune pagination. Il comprend
d'abord 3 pages intitulées : Des nombres connus | chez les MAÇONS ; puis une
page blanche ; puis une page intitulée : Extrait tiré de la Préface | du
Livre de l'Exode [etc.] ; puis une page blanche ; puis 2 pages intitulées :
Remarque historique | maçonnique ; puis 14 pages blanches ; puis une page
intitulée Préface (c'est en fait un résumé de la préface du Sceau Rompu) ;
puis 4 pages dont l'ensemble est intitulé : KHATAMPHAROUQ ou | le Sceau Rompu.
Les
17 dernières pages sont blanches.
Le
manuscrit, y compris la notice: Idée du but de la Maçonnerie, intercalée
entre le titre et la première page, est écrit en entier de la même main, sauf
peut-être deux ou trois additions sans intérêt pour leur contenu, et dont la
plus longue ne dépasse pas deux lignes, pour lesquelles une hésitation est
permise. Le manuscrit ne porte aucune date ; nous ignorons par suite quand il a
été écrit. On peut toutefois arriver, dans une certaine mesure, à établir
entre ses différentes parties ce qu'on appelle en préhistoire une chronologie
relative, c'est-à-dire ici l'ordre dans lequel elles ont été successivement
écrites. L'auteur [...]
a certainement écrit en premier lieu les
32 premières pages du manuscrit, puis les pages qui forment la fin du premier
fascicule, et dont la plus grande partie est constituée par les Renvois aux
demandes et réponses de la première partie. Ces deux parties du premier
fascicule correspondent à ce qu'un géologue appellerait deux couches ou étages,
chronologiquement successifs.
La
troisième partie du manuscrit, à savoir le second fascicule, composé, à la
différence du premier, de notices qui, tout en ayant un intérêt maçonnique,
ne concernent pas le rituel proprement dit, peut fort bien avoir formé d'abord
un cahier indépendant, et n'avoir été rattaché au premier que plus tard.
Arrêtons
ici un instant la citation extraite de l'Introduction
écrite par Luquet et tentons d'établir avec lui la Table des Matières de ce
manuscrit. Deux cahiers, nous dit-il, respectivement de 20 et 10 feuilles
doubles, formant ensemble 120 pages de 17 x 25 cm. Le premier cahier comporte
donc 80 pages et le second 40.
Premier
Cahier, partiellement paginé :
1.
Page 1 = couverture du cahier portant le titre général : Le
Vrai Catéchisme...,
2.
4 pages brochées supplémentaires : Idée
du but de la Maçonnerie,
3.
32 pages comportant les rituels des trois grades,
4.
6 pages (avec une erreur de pagination) : 1ere
Histoire de la Maîtrise... & Ordre
ou Langage des Banquets,
5.
30 pages de renvois, comportant également une erreur de pagination,
6.
4 pages blanches, avec le titre : Renvoi
historique,
7.
10 pages : Préparation d'une LOGE DE MAÎTRE.
En
additionnant le nombre de pages indiqué par Luquet, on arrive à 82 pages (avec
les 4 pages brochées supplémentaires, à 86 pages), en contradiction avec
l'indication que ce premier cahier comporte 80 pages.
Second
Cahier non paginé :
1.
3 pages : Des nombres connus chez les MAÇONS,
2.
1 page blanche,
3.
1 page : Extrait tiré de la Préface du Livre de l'Exode,
4.
1 page blanche,
5.
2 pages : Remarque historique maçonnique,
6.
14 pages blanches,
7.
1 page : Préface,
8.
4 pages : KHATAMPHAROUQ ou le Sceau Rompu,
9.
17 pages blanches.
Nous
arrivons au total de 44 pages, également en contradiction avec l'indication de
Luquet selon laquelle ce second cahier comprend 40 pages.
Un
autre point doit être maintenant abordé. Comme l'indique Luquet, une partie du
premier cahier inclut trente pages de renvois. Voici ce que Luquet écrivait à
leur sujet.
La
deuxième partie du manuscrit, composée essentiellement de renvois complémentaires
aux Instructions de la première partie, a certainement été écrite après
elle. Pour son contenu, elle ne présente aucun ordre systématique ; il
n'existe aucune concordance entre l'ordre de succession des renvois et l'ordre
des pages correspondantes de la première partie. Par exemple, pour nous en
tenir aux deux premiers renvois, le premier concerne le grade de Maître et le
second le grade d'Apprenti. On ne peut même pas conclure de l'ordre de
succession des renvois dans le manuscrit à l'ordre chronologique dans lequel
ils ont été écrits.
D'après
divers indices concordants, j'inclinerais à croire que l'auteur, après avoir
écrit la première partie, avait commencé par numéroter dans son cahier un
nombre de pages blanches égal au nombre (32) des pages de la première partie,
avec l'intention de porter sur chacune d'elles les renvois de la page
correspondante du texte primitif.
Mais
cette méthode par trop mathématique s'est, à l'usage, révélée impraticable,
d'autant plus que par la suite de la bévue commise dans la pagination, qui
saute de 6 à 9, il n'y avait dans les pages des renvois aucune page pour les
renvois des pages 7 et 8 du texte primitif. Certaines pages des renvois n'ont
pas été assez longues pour contenir tous les renvois de la page correspondante
de la première partie ; l'auteur a été obligé d'inscrire ces renvois sur une
autre page des renvois où il restait de la place ou même qui était totalement
blanche.
L'ordre
de succession des renvois sur les pages de renvois ne permet donc aucune
conclusion sur l'ordre chronologique dans lequel il y ont été inscrits. Mais
on peut distinguer dans ces renvois deux époques successives, grâce à un
autre indice matériel, à savoir selon qu'ils font ou non usage des trois point
disposés en triangle (\) comme signe d'abréviation. [...]
Luquet
continue en tirant des conclusions sur la date de composition des renvois
comprenant le signe \
car, écrit-il,
Dans
les textes datés connus de moi, ce signe est employé pour la première fois en
1766, et, au moins jusqu'en 1774, dans une mesure très restreinte, pour les
termes maçonniques les plus usuels.
Or
des lettres autographes d'Estienne Morin, datées de 1757, que j'ai retrouvées
récemment,[xxi]
montrent au contraire un usage relativement fréquent du signe\,
ce qui avance d'une dizaine d'années la datation approximative que Luquet
pensait pouvoir attribuer aux renvois qui en font usage.
Indication
importante de Luquet : “Les \
ne se rencontrent pas une seule fois dans la première partie du manuscrit”.
Il en tire la conclusion suivante :
Il
semble légitime de distinguer dans le premier fascicule du manuscrit trois
couches ou périodes successives : d'abord la première partie, datant de 1745
au plus tard ; ensuite les renvois hiéroglyphés sans \, compris approximativement entre 1745 et 1766 ;
enfin les renvois avec \, postérieurs à cette dernière date."
Pourquoi
Luquet attribue-t-il à la première partie du manuscrit la date de “1745
au plus tard” ? Voici sa réponse:
Cette
première partie [celle
qui comprend les rituels des trois premiers grades] bien que plus complète, même sans tenir compte des additions des
renvois postérieurs, que toutes les divulgations imprimées mises ensemble, présente
une ressemblance étroite et souvent textuelle avec le Sceau rompu (1745). [...]
la similitude des demandes et réponses
des Instructions dans le Sceau rompu et dans notre manuscrit donne à penser
qu'elles ont été copiées les unes et les autres sur des cahiers de rédaction
semblable. Il paraît en conséquence légitime de conclure que la première
partie de notre manuscrit a été copiée sur des cahiers de grades qui
existaient en 1745 et par suite représente le rituel pratiqué au plus tard à
cette date. [...]
Il
m'apparaît que d'autres hypothèses auraient pu également être envisagées
par Luquet : l'auteur du manuscrit pourrait être le même que celui du Sceau rompu (le présent manuscrit aurait constitué son “brouillon”),
il pourrait avoir recopié son manuscrit sur le
Sceau rompu. Cependant le chiffre utilisé dans le présent manuscrit ne
semble pas plaider en leur faveur.[xxii]
Nous reviendrons sur la question de la chronologie relative des textes et des éditions
des différentes brochures publiées en France à partir de 1738 dans le
prochain numéro de Masonica.[xxiii]
Laissons
à nouveau la parole à Georges Luquet.
A
mon avis, quand on publie un texte, ce n'est point le trahir, mais le servir,
que d'en faciliter la lecture à ses lecteurs éventuels. Aussi ai-je substitué
sans scrupule l'orthographe et la ponctuation actuellement en usage à celles du
manuscrit, qui y sont d'ailleurs assez flottantes, les articulations du discours
étant indiquées par des ponctuations variées, et un même mot recevant, à
diverses reprises, des orthographes différentes. En particulier, j'ai à
l'occasion ajouté des points d'interrogation.
Le
manuscrit utilise indifféremment pour les initiales les majuscules et les
minuscules, rendues tantôt par une même forme de lettre, tantôt par des
formes différentes. J'ai suivi l'usage actuel, mettant en majuscule l'initale
des noms propres et celle des mots qui commencent une phrase. Dans les autres
cas, j'ai employé indifféremment, comme le manuscrit, des majuscules ou des
minuscules.Toutefois, pour le mot ordre, j'ai mis régulièrement une majuscule
lorsqu'il signifie l'Ordre maçonnique, une minuscule lorsqu'il est employé
soit dans quelqu'un de ses sens profanes, soit dans l'expression être ou se
mettre à l'ordre. Je me suis cru également non seulement autorisé, mais même
obligé, à corriger certains lapsus évidents. [...]
La
transcription matérielle [...] soulevait deux difficultés,
relatives l'une aux hiéroglyphes de l'alphabet secret des Maçons, l'autre aux
abréviations. J'ai [...] substitué
aux hiéroglyphes les lettres ordinaires correspondantes, majuscules pour les hiéroglyphes
écrits sur la ligne, minuscules pour les hiéroglyphes écrits au-dessus de la
ligne et généralement plus petits, correspondant à des lettres finales de
mots abrégés. Ces lettres correspondant à des hiéroglyphes ont été composées
en italique, pour les distinguer de celles qui dans le manuscrit étaient en
lettres ordinaires. En particulier, on peut distinguer ainsi dans un même mot
les lettres qui dans l'original sont écrites en clair et celles qui sont
rendues par des hiéroglyphes.
Les
mots, qu'ils soient écrits en clair ou en chiffre, sont fréquemment abrégés,
spécialement dans la première partie du manuscrit. Pour
ces abréviations, l'auteur a employé des procédés variés. Dans des cas
relativement rares et exclusivement pour des mots écrits en lettres ordinaires, il
supprime un plus ou moins grand nombre de lettres internes du mot et écrit les
lettres conservées comme dans un mot complet (par exemple : prpaux ou ppaux
pour principaux).
Le
plus souvent, la première ou les premières lettres sont écrites sur la ligne,
comme dans des mots non abrégés, et la ou les finales sont écrites en l'air,
autrement dit au-dessus de la ligne. Parfois, ces lettres finales sont remplacées
par un signe qui ne correspond pas à une lettre déterminée, mais indique
simplement une abréviation quelconque. Dans d'autres cas, les lettres initiales
sont seules écrites, sans finales en l'air. Que les finales soient rendues ou
non, le mot abrégé est suivi soit d'un point, soit d'un nombre variable de
points de suspension disposés horizontalement. Le point unique et les points de
suspension se rencontrent également après des mots écrits en entier, mais en
hiéroglyphes.
J'ai
transcrit fidèlement les lettres du manuscrit, tant dans leur nature que dans
leur position sur la ligne ou en l'air, sous la seule réserve que lorsque les
lettres finales étaient rendues par un signe indéterminé, je lui ai substitué
la lettre précise convenable. Mais il m'a semblé opportun d'apporter à
l'usage des points un peu plus de simplicité et de cohérence. J'ai distingué
d'une part les mots complets, en entendant par là les mots dont les finales
sont écrites aussi bien que les initiales, même s'il manque les lettres intermédiaires,
d'autre part les mots incomplets, privés de leurs dernières lettres. J'ai fait
suivre d'un point unique les mots incomplets, et n'en ai mis aucun après les
mots complets.
Sous
ces diverses réserves, ma transcription, sans être servile, est rigoureusement
fidèle.
Résumons
les modifications de Luquet :
Il
a modernisé l'orthographe, la ponctuation et l'emploi de lettres majuscules ou
minuscules du manuscrit, et a choisi de les rendre cohérents.
Il
a corrigé des
“lapsus
évidents”.
Il
a “substitué aux hiéroglyphes les
lettres ordinaires correspondantes...”. Dans sa transcription
dactylographiée, Luquet a souligné ces lettres afin d'indiquer à un éventuel
imprimeur qu'elles devraient être composées en italique.
Il
a “substitué la lettre précise
convenable” au signe (qu'il n'indique pas) qui, dans le manuscrit, était
utilisé comme signe terminal des mots abrégés, et modifié le nombre de
points utilisés à la suite de ces mots abrégés.
Il
a distingué entre des renvois de première et de seconde périodes, en fonction
de la présence ou de l'absence du signe \
qui, d'après ce qu'il écrit, se trouve dans les seconds et non dans les
premiers.
DESCRIPTION
DE LA PRÉSENTE TRANSCRIPTION
Luquet
pensait bien faire et faciliter la tâche du lecteur en introduisant les
modifications énumérées par lui. Aujourd'hui, grâce aux techniques modernes
et à une conception différente de ce qui doit caractériser une transcription
“rigoureusement fidèle”, notre
travail serait différent : il nous paraîtrait normal de reproduire le
manuscrit original en fac-similé et de présenter en regard de chacune de ses
pages une transcription qui en rendrait la lecture aisée, tout en permettant, là
où il y aurait difficulté de lecture ou équivoque possible, l'examen et le
contrôle du texte original.
Mais
la transcription effectuée par Luquet ne permettant pas de reconstituer le
manuscrit original aujourd'hui disparu, j'ai scrupuleusement recopié son texte
dactylographié (même là où j'ai des raisons de penser que sa transcription
est inexacte) à l'exception suivante: dans certains cas, Luquet avait noté à
la main, en marge de sa transcription, que tel mot - chiffré ou non - lui
semblait erroné et qu'il avait jugé bon de le rectifier. J'ai alors toujours rétabli
le texte original, tel que Luquet l'indiquait.[xxiv]
Luquet
avait transcrit en lettres majuscules soulignées les lettres initiales et les
mots qui dans le manuscrit original étaient tracés en hiéroglyphes. Je les ai
transcrits en majuscules italiques en respectant sa disposition typographique
lorsque certaines lettres étaient placées au-dessus de la ligne.
Afin
de faciliter les références à des passages spécifiques du texte, j'ai ajouté
[entre crochets carrés] une numérotation aux 125 questions et réponses que
comprend le manuscrit primitif du grade d'Apprenti.
Mais
- à la différence de Luquet - j'ai choisi de ne pas insérer dans le texte de
ce qui constitue la première partie du premier cahier du manuscrit original,
les ajouts des renvois que Luquet dit se trouver dans sa seconde partie. En
effet, la distinction faite par Luquet entre renvois de première ou de seconde
période, en fonction de la présence ou de l'absence du signe \,
est contredite par la transcription même de Luquet : on voit aussi bien les
nombreux renvois qu'il indique être de seconde période, ne comporter aucun
signe \,
alors que le seul renvoi à comporter ce signe à trois reprises (le premier
"Discours pour une Réception d'Apprenti" [39+]), est indiqué par
Luquet lui-même comme un renvoi de première période.
Mon
choix ne facilitera peut-être pas la lecture de ces renvois. En contrepartie il
me semble avoir l'avantage inappréciable de permettre la lecture d'un trait de
ce qui était - j'en suis presque convaincu - l'état primitif d'un rituel
authentique de langue française, à une époque que nous allons maintenant brièvement
tenter de préciser.
QUELLE
DATE ATTRIBUER À CE RITUEL
?
Un
élément donne à ce sujet une indication précieuse : on verra dans ce rituel
(D et R 26-27) qu'il est fait mention d' “un mot de passe en qualité
d'APP[renti]”, et qu'une allusion à ce mot se retrouve à la clôture des
travaux (D et R 120-121).
Les
mots de passe maçonniques ont fait l'objet d'une étude intéressante par le
Brigadier A.C.F. Jackson, il y a une vingtaine d'années (AQC
87, 1974, pp. 106-131). Il y rappelle que c'est dans L'Ordre des Francs-Maçons
Trahi (1745) qu'on trouve (p. 99) la première mention imprimée connue d'un
Mot de passe pour chacun des trois
grades, et qu'elle y est accompagnée du commentaire suivant :
Ces
trois Mots de passe ne sont guères en usage qu'en France, & à Francfort
sur le Mein. Ce sont des espèces de Mots du guet, qu'on a introduits pour
s'assurer d'autant mieux des Frères que l'on ne connoit point.
Le
Brigadier Jackson avait donc demandé au Frère (Prof. Dr.) Karl Demeter qui, en
1967, avait publié une histoire de la très ancienne Loge L'Union (Die Frankfurter Loge
zur Einigkeit 1742-1966) de
Francfort sur le Main, des renseignements à ce sujet. Dans sa réponse
reproduite dans l'article d'AQC, p.
108, le Frère Demeter indiquait qu'il lui avait été impossible de trouver des
informations concernant les mots de passe dans les archives de sa Loge, qui
avaient appartenu à l'historien Kloss avant d'être aujourd'hui préservées
dans la bibliothèque du Grand Orient des Pays-Bas.
Pourtant
Kloss avait publié en 1842 un livre intitulé Annalen
der Loge zur Einigkeit..., réimprimé en fac-similé en 1972, dans lequel
on trouve des renseignements du plus haut intérêt concernant l'époque et les
circonstances dans lesquelles les mots de passe apparaissent en Maçonnerie. Le
30 janvier 1745, l'Union de Francfort
recevait une lettre de la Loge Aux Trois
Globes de Berlin, datée du 19 janvier précédent, dans laquelle des "mesures
de précaution" étaient proposées par les Frères berlinois. Elles
consistaient en "des signes et des mots maçonniques supplémentaires"
qui furent immédiatement adoptés par les Frères de Francfort, qui décidèrent
de suggérer leur adoption aux Loges avec lesquelles ils étaient eux-mêmes en
correspondance (Annalen, pp. 14 &
15).
Ces
indications confirment celles du Trahi,
et notre rituel date, à mon avis,de 1745 au plus tôt (Luquet écrivait “au
plus tard”), année au début
de laquelle la correspondance entre Berlin et Francfort signale l'invention des
mots de passe, et au cours de laquelle non seulement le Trahi,
mais encore une autre brochure non moins intéressante, Le Sceau Rompu, furent publiées. On se rappellera que dans sa présentation
du manuscrit, Luquet signalait “une ressemblance étroite et souvent textuelle” avec cette seconde
brochure.
[i]
« Ces gazetins ou “Nouvelles
à la main” étaient des feuilles d'informations manuscrites qui
circulaient sous le manteau. Elles émanaient de deux sources différentes,
que déjà les contemporains ne distinguaient pas nettement; on comprend sans
peine que c'est encore plus difficile pour nous. Les unes étaient rédigées
par des particuliers, dans une intention purement commerciale. Les autres,
composées par la police, étaient destinées à faire croire au public et, à
l'occasion, au Roi, ce qu'elles jugeaient à propos. Dans les unes comme dans
les autres, il est fort malaisé de faire la part de la vérité; il n'en
reste pas moins que, comme elles avaient l'air de refléter l'opinion publique
de l'époque, elles contribuaient à la façonner » (Luquet, op.
cit., p. 192).
[ii]
Il y a une vingtaine d'années, J. Corneloup me remit la copie
dactylographiée d'un document en deux parties, demeuré inédit jusqu'à ce
jour. Il s'agissait d'un rituel manuscrit et partiellement chiffré, précédé
d'une Introduction écrite par Georges Luquet afin de présenter, décrire
et commenter ce manuscrit que Luquet avait transcrit après l'avoir découvert
dans la bibliothèque du Grand Collège des Rites à Paris (sous la cote
‘Inventaire Baron 231’) où il ne semble plus se trouver aujourd'hui.
[iii]
Après la présentation devant la loge Quatuor
Coronati, le 7 janvier 1944, du texte intitulé Dialogue between Simon and Philip, dont la date présumée était
indiquée comme “c. 1740” dans Early
Masonic Catechisms (1943) par Knoop, Jones et Hamer, ces derniers changèrent
d'opinion et estimèrent que sa date de composition remonterait aux environs
de 1725 (voir AQC 57 [1946], p. 20).
[iv]
Dans un article paru dans Renaissance
Traditionnelle No 47 (1981), consacré aux trois plus anciens de ces
textes, René Desaguliers traduit le mot anglais catechism
par le mot français instruction, et nous suivons ici son exemple.
[v]
Kloss Bibliographie Nr. 1836.
Carr
in AQC 94 (1981), p. 125.
[vi]
David Stevenson, The Origins of Freemasonry - Scotland's century 1590-1710, Cambridge
University Press, 1988. Une traduction
française est parue en 1993.
[vii]
Rappelons que l'actuelle Grande Loge de France ne
fut fondée qu'en 1894.
[viii]
Bulletin du Centre de
Documentation du Grand Orient de France No 51 (mai-juin 1965). En ce qui
concerne l'auteur de la transcription, voir la préface de J. Corneloup au
livre de L.J. Piérol, Le Cowan
(1966, éd. Vitiano, Paris), p. 38. Au sujet de Coustos et de sa Loge, voir McLeod,
‘John Coustos : His Lodges and His Book’,
AQC 92 (1979), pp. 113-147 &
‘More Light on John Coustos’, AQC
95 (1982), pp. 117-119. Au sujet du manque de soin apporté
à la transcription parue dans le Bulletin,
voir McLeod, AQC 92, p. 138, note 9.
[ix]
Voir Alain Bernheim: ‘Contribution à la connaissance de la genèse
de la première Grande Loge de France’ (Travaux
de Villard de Honnecourt, Tome X, 1974; article réimprimé en 1988 dans
le No 17 des Travaux de la Loge
nationale de recherches Villard de Honnecourt) & ‘Notes on Early
Freemasonry in Bordeaux (1732-1769)’ in AQC
101 (1988). Une partie de l'Appendice I (AQC
101, pp. 99-102) fournit des indications biographiques sur Sitwell, Saint-Claudius
No 21 (première loge de recherche à avoir existé en France, dont
Sitwell fut le fondateur et le premier VM) et sur les documents que Sitwell
avait retrouvés dans les années 1925-1930, leur origine et leur localisation
actuelle aux États-Unis.
[x]
Voir Alain Bernheim ‘The Mémoire
Justificatif of La Chaussée, and Freemasonry in Paris until 1773’ (AQC 104, 1992, pp.
95-120) avec références aux éditions en fac-similé par Robert Amadou
(Edi-Repro, 1979) et Daniel-Paul Lobreau (éd. Jeanne Laffitte, 1981), toutes
deux épuisées, et à l'édition du texte défectueux de la copie
dactylographiée, trouvée en 1976 dans la bibliothèque de Jean Baylot (éd.
Lauzeray International, 1977), dont l'intérêt réside dans les commentaires
de M. Pierre Chevallier qui l'accompagnent. Une nouvelle édition du Mémoire en fac-similé, accompagnant l'Histoire de la Fondation du Grand Orient de France (1812) de Thory,
est parue en 1992 aux éditions Slatkine, précédée de Introduction - Avertissement par Alain Bernheim.
[xi]
Rappelons que sous l'impulsion de son directeur, René Desaguliers, la
revue Renaissance Traditionnelle a
publié et commenté plusieurs rituels des premiers grades écossais pratiqués
en France (RT Nos 9, 10, 42), et
signalons que le No 86 (avril 1991) de cette revue comprend un article
fondamental de René Desaguliers, ‘La Grande Loge de Paris, dite de France,
et les
“autres” grades, de 1756 à 1766’, accompagné de la transcription de plusieurs
rituels Écossais inédits d'une importance exceptionnelle.
[xii]
Au sujet de ce livre publié par Harry Carr, The
Early French Exposures 1737-1751, voir les remarques de René Desaguliers,
publiées dans Renaissance
Traditionnelle No 19-20 (1974), p. 231.
[xiii]
Par exemple L'Ordre des Francs-Maçons
Trahi, et le Secret des Mopses Révélé (1745) réimprimé en fac-similé
aux éditions Slatkine (Genève-Paris, 1980).
[xiv]
L'évaluation de la véracité des documents peut être faussée par
des idées préconçues : parce qu'une prière n'apparaît pour la première
fois dans une divulgation anglaise qu'en avril 1760 (voir infra
note 15), Chetwode Crawley (AQC
9, p. 29) en 1898 et Knoop, Jones et Hamer (Early
Masonic Catechisms, Introduction,
p. 21) en 1943, en déduisaient froidement que les catechisms antérieurs ne pouvaient être que faux ou incomplets.
[xv]
Masonry Dissected (octobre
1730) est le dernier catechism publié
connu. En avril 1760, après un silence apparent de trente ans, paraît une
divulgation (exposure) intitulée Three Distinct Knocks. Il s'agit maintenant d'un rituel à
proprement parler. Trois textes de cette nouvelle famille sont transcrits et
commentés dans English Masonic
Exposures 1760-1769 (Lewis Masonic, 1986) par le Brigadier A.C.F. Jackson.
[xvi]
Fac-similé publié (s.d.) par LODI, BP 48, F-89500
Villeneuve-sur-Yonne (Bibliotheca Masonica August Belz, St. Gallen, Bz 6491).
[xvii]
Il n'y a guère de bibliographies ou d'ouvrages de références maçonniques
qui n'indiquent que la première édition du Secret
des Francs-Maçons serait parue en 1742. Il me semble qu'il y a ici une
erreur. On trouve en effet mention d'un ouvrage intitulé "Sécrets [sic]
des francs-maçons. Genève 1742." sous le numéro 8412 du Supplément
à la Bibliographie de Wolfstieg, établi
en 1926 par Bernhard Beyer. Cet ouvrage se trouvait alors dans la bibliothèque
de la Loge Eleusis zur Verschwiegenheit
de Bayreuth. Mais Beyer précise qu'il s'agit d'une brochure in-8 de six
pages. Il est difficile d'y voir une première édition de l'ouvrage de l'abbé
Pérau, décrit dans une brochure anti-maçonnique datée de 1744, Examen
de la Société des Francs-Maçons, comme « un écrit publié au
commencement de cette année... une brochure in-12°
de 125 pages... ». Le Nouveau Catéchisme
(voir infra, note 19) indique également
que le Secret fut « imprimé
en 1744 » (2ème partie, p. 69).
[xviii] Page
42 de l'édition (X + 160 pp.) datée ‘M. DCC. XLIV.’ sans indication de
lieu d'impression (Bibliotheca Masonica August Belz, St. Gallen, Bz 1813).
[xix]
Voir le Nouveau Catéchisme des
Francs-Maçons (1749), p. 44 (Bibliotheca Masonica August Belz, St. Gallen,
Bz 1824).
[xx]
Il y a ici un lapsus calami
de Luquet : sa propre transcription porte « 1ere
Histoire de la Maîtrise (et non "de la Maçonnerie") pendant
que le Récipiendaire est dans le Tombeau ».
[xxi]
Voir par exemple p. 95 de l'article d'AQC
101 (1988), mentionné supra note 9.
[xxii]
Sur la question des chiffres employés dans les publications de la décennie
1740, on se reportera aux articles de Guy Tamain, ‘La clé géométrique du
premier alphabet maçonnique (1745)’ (Chroniques
d'Histoire Maçonnique, No 41, 1988) & ‘La clé arithmétique du
premier alphabet maçonnique connu’ (Association
Française du Temple de Salomon, Bulletin No 1 & 2, 1991). Ce problème
a été abordé d'une manière magistrale, mais plus technique, par Alfred
Engel dans ‘Die freimaurerischen Geheimschriften - Geschichte und Entschlüsselung’
(Quellenkundliche Arbeiten Nr. 5,
1972, Quatuor Coronati Loge, Bayreuth).
[xxiii]
Voir l'étude en deux parties, publiée dans Ars
Quatuor Coronatorum par A.J.B. Milborne, ‘The Early Continental
Exposures and their Relationship to Contemporary English Texts’ (AQC 78, 1965, & AQC
83, 1970), dans laquelle on relève de surprenantes approximations, ainsi que
les commentaires de Harry Carr dans The
Early French Exposures 1737-1751. J’ai publié une étude complète sur
ce sujet en 1994, 'Masonic Catechisms and Exposures' (AQC 106, pp. 141-153) sous
le pseudonyme Henri Amblaine.
[xxiv]
Le texte de Luquet fut parfois difficile à déchiffrer et l'usage
d'une loupe s'avéra fréquemment nécessaire : non seulement Luquet utilisait
une machine à écrire vétuste, mais il agrémentait sa transcription
dactylographiée de nombreuses remarques, souvent abrégées, tracées en
caractères microscopiques soit à la plume, soit même au crayon.
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