LE DISCOURS DU CHEVALIER DE RAMSAY
La noble ardeur que vous montrez, Messieurs, pour entrer dans le très noble
et très illustre Ordre des Francs-Maçons, est une preuve certaine que vous
possédez déjà toutes les qualités nécessaires pour en devenir les membres,
c’est-à-dire: L’HUMANITE, LA MORALE PURE, LE SECRET INVIOLABLE
et le GOUT DES BEAUX ARTS.
Lycurgue, Solon, Numa et tous les législateurs politiques n’ont pu rendre
leur établissement durable, quelques sages qu'étaient leurs Lois, elles n’ont
pu s’étendre dans tous les pays et dans tous les siècles. Comme elles
n’avaient en vues que les victoires et les conquêtes, la violence militaire
et l’élévation d’un Peuple au-dessus d'un autre, elles n’ont pu devenir
universelles, ni convenir au goût, au génie et aux intérêts de toutes les
Nations. La philantropie n’était pas leur base. L’Amour de la Patrie, mal
entendu et poussé à l’excès détruisaient souvent, dans ces républiques
guerrières, l’amour et l’Humanité en général.
Les Hommes ne sont distincts essentiellement par la différence des langues
qu’ils parlent, des habits qu’ils portent, des pays qu’ils occupent, ni des
dignités dont ils sont revêtus.
Le Monde entier n’est qu’une République dont chaque Nation est une famille et
chaque particulier un enfant. C’est pour faire revivre et répandre ces
essentielles maximes, prises dans la nature de l’Homme que notre Société fut
d’abord établie.
Nous voulons réunir tous les Hommes d’un esprit éclairé de moeurs douces et
d’une humeur agréable, non seulement par l’amour des Beaux-Arts, mais encore
plus par les grands principes de vertu, de science et de religion, où
l’intérêt de la Confraternité devient celui du genre humain tout entier, où
toutes les Nations peuvent puiser des connaissances solides et où les sujets
de tous les Royaumes peuvent apprendre à se chérir mutuellement, sans renoncer
à leur Patrie.
Nos encêtres, les Croisés, rassemblés de toutes les parties de la Chrétienté
dans la Terre Sainte voulurent réunir ainsi dans une seule Confraternité les
particuliers de toutes les Nations.
Quelle obligation n’a-t-on pas à ces Hommes Supérieurs qui, sans intérêt
grossier, sans même écouter l’envie naturelle de dominer, ont imaginé un
établissement dont l’unique but est la réunion des esprits et des coeurs pour
les rendre meilleurs et former dans la suite des temps, une Nation toute
spirituelle, où sans déroger aux divers devoirs que la différence des Etats
exige, on créera un Peuple nouveau, qui, étant composé de plusieurs Nations,
les cimentera toutes en quelque sorte par le lien
de la Vertu et de la Science.
La saine morale est la seconde disposition requise dans notre Société.
Les Ordres religieux furent établis, pour rendre les hommes Chrétiens
parfaits; les Ordres militaires, pour inspirer l’amour de de la vraie gloire,
et l’Ordre des Francs-Maçons pour former des Hommes et des Hommes aimables,
de bons citoyens, de bons sujets, inviolables dans leurs promesses, fidèles
adorateurs du Dieu de l’Amitié, plus amateurs de la Vertu que des récompenses.
Polliciti servare fidem, sanctumque vereri,
Numen amicitiae, mores, non numera amare.
Ce n’est pas cependant que nous nous bornions aux vertus purement civiles.
Nous avons parmi nous trois espèces de Confrères: des Novices ou des
Apprentis, des Compagnons ou des Profès, des Maîtres ou des Parfaits. On
explique aux premiers les vertus morales, aux seconds les vertus héroïques,
et aux derniers les vertus Chrétiennes, de sorte que notre Institut renforme
toute la philosophie des sentiments et toute la Théologie du Coeur. C’est
pourquoi un de nos vénérables Confrères dit:
Free-Maçons, illustre Grand Maître
Recevez nos premiers transports
Dans mon coeur l’Ordre les fait naître
Heureux si de nobles efforts
Me font mériter votre estime
Et m’élèvent au vrai sublime
A la première vérité
A l’essence pure et divine
de l’âme céleste origine
Source de vie et de clarté.
Comme une philosophie triste, sauvage et misanthrope dégoûte les hommes de
la vertu, nos ancêtres les Croisés voulurent la rendre agréable, d’une joie
pure et d’une gaieté raisonnable.
Nos festins ne sont pas ce que le monde profane et l’ignorant vulgaire
s’imaginent. Tous les vices du coeur et de l’esprit en sont bannis et on a
proscrit l’irréligion et le libertinage, l’incrédulité et la débauche.
Nos repas ressemblent à ces vertueux soupers d’Horace, où l’on pouvait
s’entretenir de tout ce qui pouvait éclairer l’esprit, régler le coeur et
inspirer le goût du vrai, du bon et du beau.
0 noctes coenoeque Deum
Sermo oritur, non de regnis domisbusve aliens
Sed quod magis ad nos
Pertinet et nescire matum est agitamus utrume
Divitits homines an sint virtuti beati;
Quitue ad amicitas usus rectumve trehat nos
Et quoe sit natura boni, summumque quid ejus.
Ainsi les obligations que l’ordre vous impose sont de protéger vos Confrères
par votre autorité, de les éclairer par vos lumières, de les édifier par vos
vertus, de les secourir dans leurs besoins, de sacrifier tout ressentiment
personnel et de rechercher tout ce qui peut contribuer à la paix et à l’union
de la Société.
Nous avons des secrets, ce sont des signes figuratifs et des paroles sacrées,
qui composent un langage tantôt muet, tantôt très éloquent pour le communiquer
à la plus grande distance et pour reconnaître nos Confrères de quelque langue
qu’ils soient.
C’étaient des mots de guerre que les Croisés se donnaient les uns aux autres
pour se garantir des surprises des Sarrasins qui se glissaient parmi eux pour
les égorger. Ces signes et ces paroles rappellent le souvenir ou de quelque
partie de notre science, ou de quelque vertu morale ou de quelque mystère de
la foi. Il est arrivé chez nous ce qui n’est guère arrivé dans aucune autre
Société. Nos Loges ont été établies et sont répandues dans toutes les Nations
policées et cependant parmi une si nombreuse multitude d’hommes, jamais aucun
Confrère n’a trahi nos secrets. Les esprits les plus légers, les plus
indiscrets, les moins instruits à se taire, apprennent à se taire, apprennent
cette grande Science en entrant dans notre Société, tant l’idée de l’union
fraternelle a d’empire sur les esprits.
Ce secret inviolable contribue puissamment à lier les sujets de toutes les
Nations, et à rendre la communication des bienfaits facile et mutuelle entre
nous. Nous en avons plusieurs exemples dans les annales de notre Ordre. Nos
Frères qui voyageaient en divers pays n’ont eu qu’à la faire connaître à nos
Loges pour y être comblés à l’instant de toute sorte de secours, dans le même
temps que des guerres les plus sanglantes d’illustres prisonniers ont trouvé
des Frères où ils ne croyaient trouver que des ennemis.
Si quelqu’un manquait aux promesses solennelles qui nous lient, vous savez,
Messieurs, que les peines que nous lui imposons sont les remords de sa
conscience, la honte de sa perfidie et l’exclusion de notre Société, selon
ces belles paroles d’Horace:
Est et fideli tuta silentia
Merces, vestabo qui cereris sacrum
Vulgaris arcanum sub lisdem
Sit trabibus, fragilemque mecum
Salvat phaselum...
Oui, Messieurs, les fameuses fêtes de Cérès à Eleusis, d’Isis en Egypte, de
Minerve à Athènes, d’Uranie chez les Phéniciens et de Diane en Scytie avaient
des rapports avec les nôtres. On y célébrait des mystères où se trouvaient
plusieurs vestiges de l’ancienne Religion de Noé et des Patriaches. Elles
finissaient par des repas et des libations et on n’y connaissait ni
l’intempérance ni les excès où les Païens tombèrent peu à peu. La source de
ces infamies fut l’admission des personnes de l’un et l’autre sexe aux
Assemblées nocturnes contre l’institution primitive. C’est pour prévenir de
tels abus que les femmes sont exclues de notre Ordre. Nous ne sommes pas
assez injustes pour regarder le sexe comme incapable du secret, mais sa
présence pourrait altérer insensiblement la pureté de nos maximes et de nos
moeurs.
La quatrième qualité requise dans notre Ordre est le goût de la Science et
des Arts Libéraux. Ainsi l’Ordre exige de chacun de vous de contribuer par
sa protection, par sa libéralité ou par son travail, à un vaste ouvrage
auquel nulle Académie ne peut suffire parce que toutes ces Sociétés étant
composées d’un très petit nombre d’hommes leur travail ne peut embrasser un
objet aussi étendu.
Tous les Grands Maîtres en Allemagne, en Angleterre, en Italie et ailleurs
exhortent tous les Savants et tous les artisans de la Confraternité de
s’unir pour fournir les matériaux d’un Dictionnaire Universel des Arts
Libéraux et des Sciences utiles, la Théologie et la Politique seules
exceptées. On a déjà commencé l’ouvrage à Londres et par la réunion de nos
Confrères, on pourra le porter à sa perfection dans peu d’années. On y
explique non seulement les mots techniques et leur étymologie, mais on y
donne encore l’histoire de chaque science et de chaque art, leurs principes
et la manière d’y travailler.
Par là, on réunira les lumières de toutes les Nations dans un seul ouvrage
qui sera comme une Bibliothèque universelle de tout ce qu’il y a de grand,
de lumineux, de solide et d’utile dans tous les arts nobles. Cet ouvrage
augmentera dans chaque siècle, selon l’augmentation des lumières et il
répandra partout l’émulation et le goût des belles choses et des choses
utiles.
Le nom de Franc-Maçon ne doit donc pas être pris dans un sens littéral
grossier et matériel, comme si nos instituteurs avaient été de simples
ouvriers en pierre ou des génies purement curieux, qui voulaient
perfectionner les arts. Ils étaient d’habiles architectes qui voulaient
consacrer leurs talents et leurs biens à la construction des temples
extérieurs, mais aussi des principes religieux et guerriers qui voulurent
éclairer, édifier et protéger les temples vivants du Très-Haut; c’est ce
que je vais montrer en vous développant l’histoire ou plutôt le
RENOUVELLEMENT de l’ordre.
Chaque famille, chaque république, chaque empire, dont l’origine est perdue
dans une antiquité obscure, a sa fable et sa vérité et son histoire.
Quelques-uns font remonter notre institution jusqu’au temps de SALOMON,
quelques-uns jusqu’à NOE, et même jusqu’à ENOCH qui bâtit la première ville,
ou jusqu’à ADAM.
Sans prétendre nier ces origines, je passe à des choses moins anciennes.
Voici donc ce que j’ai recueilli dans les antiques Annales de la Grande-
Bretagne, dans les Actes du Parlement Britannique, qui parlent souvent de
nos privilèges et dans la tradition vivante de la Nation Anglaise qui a été
le Centre de notre Confraternité depuis le onzième siècle.
Du temps des Croisades dans la Palestine, plusieurs princes, seigneurs et
citoyens s’associèrent et firent voeu de rétablir le Temple des Chrétiens
dans la Terre Sainte et de s’employer à ramener leur architecture à sa
"Première Institution". Ils convinrent de plusieurs SIGNES ANCIENS et de mots
symboliques, tirés du fond de la Religion, pour se reconnaître entre eux
d’avec les infidèles et les Sarrazins. On ne communiquait ces signes et ces
paroles qu’à ceux qui promettaient solennellement
et, souvent même au pied des autels, de ne jamais les révéler. Cette promesse
sacrée n’était donc pas un serment exécrable comme on le débite, mais un lien
respectable pour unir les Chrétiens de toutes les Nations dans une même
Confraternité.
Quelque temps après, notre Ordre s’unit intimement avec les Chevaliers de
Saint-Jean de Jérusalem. Dès lors, nos Loges portèrent le nom de Loges de
Saint-Jean. Cette union se fit à l’exemple des Israélites lorsqu’ils élevèrent
le second temple. Pendant qu’ils maniaient la tuelle et le mortier d’une main,
ils portaient de l’autre l’épée et le bouclier.
Notre Ordre, par conséquent, ne doit pas être considéré comme un renouvellement
des Bacchanales, mais comme un Ordre moral, fondé de toute antiquité et
renouvelé en terre Sainte par nos Ancêtres, pour rappeler le souvenir des
vérités les plus sublimes au milieu des plaisirs de la Société.
Les Rois, les Princes et les Seigneurs, au retour de la Palestine, dans leurs
Etats, y fondèrent diverses Loges. Du temps des dernières Croisades, on voyait
déjà plusieurs Loges érigées en Allemagne, en Italie, en Espagne et en France
et, de là en Ecosse, à cause de l’étroite alliance des Ecossais avec les
Français.
Jacques Lord STEWARD d’Ecosse était Grand Maître d’une Loge établie à Kilwin,
dans l’Ouest d’Ecosse, en l’an MCCLXXVI peu près la mort d’Alexandre III, roi
d’Ecosse, et un an avant que Jean BALIOL montât sur le trône. Ce Seigneur
reçut les Francs-Maçons dans sa Loge, les Comtes de GLOCESTER et d’ULSTER,
l’un Anglais et l’autre Irlandais.
Peu à peu nos Loges et nos Solennités furent négligées dans la plupart des
lieux. De là vient que tant d’historiens, ceux de la Grande-Bretagne, sont
les seuls qui parlent de notre ordre. Il se conserva néanmoins dans sa
splendeur parmi les Ecossais à qui nos Rois (de France) confièrent pendant
plusieurs siècles, la garde de leurs personnes sacrées.
Après les déplorables travers des Croisades, les dépérissements des Armées
Chrétiennes et le triomphe de Bendoidar, Soudan d’Egypte, pendant la huitième
et dernière Croisade, le Grand Prince Edouard, fils de Henri III, Roi
d’Angleterre, voyant qu’il n'y avait plus de sûreté pour ses Confrères, dans
la Terre Sainte, d’où se retiraient les troupes Chrétiennes, les ramena tous
et cette colonie de Frères s’établit en Angleterre. Comme ce Prince avait tout
ce qui fait les Héros, il aima les Beaux-Arts, se déclara Protecteur de notre
Ordre, lui accorda de nouveaux privilèges et alors les membres de cette
Confraternité prirent le nom de Francs-Maçons, à l’exemple de leurs ancêtres.
Depuis ce temps-là, la Grande-Bretagne fut le siège de notre Ordre, la
conservatrice de nos Lois et la dépositaire de nos Secrets.
Les fatales discordes de Religion qui embrasèrent et déchirèrent l’Europe dans
le XVIe siècle, firent dégénérer l’Ordre de la Noblesse de son origine. On
changea, on déguisa, on supprima plusieurs de nos rites et usages, qui étaient
contraires aux préjugés du temps. C’est ainsi que plusieurs de nos Confrères
oublièrent, comme les anciens Juifs, l’esprit de nos Lois, et n’en retinrent
que la lettre et l’écorce. On a commencé à y apporter quelques remèdes. Il ne
s’agit que de continuer à ramener enfin tout à sa première institution. Cet
ouvrage ne peut guère être difficile dans un Etat où la Religion et le
Gouvernement ne sauraient qu’être favorables à nos Lois.
Des Isles Britanniques, l’Art Royal commence à repasser dans la France, sous
le règne du plus aimable des Rois dont l’humanité anime toutes les vertus et
sous le Ministère d’un Mentor, qui a réalisé tout ce qu’on avait imaginé de
fabuleux. Dans ce temps heureux où l’amour de la Paix est devenu la vertu des
héros, la Nation, une des plus spirituelles de l’Europe, deviendra le centre
de l’Ordre.
Elle répandra sur nos ouvrages, nos Statuts, nos mœurs, les grâces, la
délicatesse et le bon goût, qualités essentielles dans un ordre dont la base
est la SAGESSE, la FORCE et la BEAUTE du GENIE.
C’est dans nos Loges, à l’avenir, comme dans les écoles publiques, que les
Français verront, sans voyager, les caractères de toutes les Nations et que
les étrangers apprendront par expérience que la France est la Patrie de tous
les Peuples: "PATRIA GENTIS HUMANAE".
CHEVALIER RAMSAY'S ORATION.
The noble ardour which you, gentlemen, evince to enter into the most noble and
very illustrious Order of Freemasons, is a certain proof that you already
possess all the qualities necessary to become members, that is, HUMANITY,
PURE MORALS, INVIOLABLE SECRECY, AND A TASTE FOR THE FINE ARTS.
Lycurgus, Solon, Numa, and all political legislators have failed to make their
institutions lasting. However wise their laws may have been, they have not been
able to spread through all countries and ages. As they only kept in view
victories and conquests, military violence, and the elevation of one people at
the expense of another, they have not had the power to become universal, nor to
make themselves acceptable to the taste, spirit, and interest of all nations.
Philanthropy was not their basis. Patriotism badly understood and pushed to
excess, often destroyed in these warrior republics love and humanity in general.
Mankind is not essentially distinguished by the tongues spoken, the clothes
worn, the lands occupied, or the dignities with which it is invested. THE WORLD
IS NOTHING BUT A HUGE REPUBLIC, OF WHICH EVERY NATION IS A FAMILY,
AND EVERY INDIVIDUAL A CHILD. Our Society was at the outset established to
revive and spread these essential maxims borrowed from the nature of man.
We desire to reunite all men of enlightened minds, gentle manners, and agreeable wit,
not only by a love for the fine arts, but much more by the grand principles of
virtue, science, and religion, where the interests of the Fraternity shall
become those of the whole human race, whence all Nations shall be enabled to
draw useful knowledge, and where the subjects of all Kingdoms shall learn to
cherish one another without renouncing, their own country.
Our ancestors, the Crusaders, gathered together from all parts of Christendom in
the Holy Land, desired thus to reunite into one sole Fraternity the individuals of
all nations.
What obligations do we not owe to these superior men who, without
gross selfish interests, without even listening to the inborn tendency to dominate,
imagined such an institution, the sole aim of which is to unite minds and hearts
in order to make them better, and form in the course of ages a spiritual empire where,
without derogating from the various duties which different States exact, a new
people shall be created, which, composed of many nations, shall in some sort
cement them all into one by the tie of virtue and science.
The second requisite of our Society is sound morals. The religious orders were
established to make perfect Christians, military orders to inspire a love of
true glory, and the Order of Freemasons, to make men lovable men, good citizens,
good subjects, inviolable in their promises, faithful adorers of the God of
Love, lovers rather of virtue than of reward.
Polliciti servare fidem, sanctumque vereri Numen amicito, mores, non munera
amare.[1]
Nevertheless, we do not confine ourselves to purely civic virtues. We have
amongst us three kinds of brothers: Novices or Apprentices, Fellows or Professed
Brothers, Masters or Perfected Brothers. To the first are explained the moral
virtues; to the second the heroic virtues; to the last the Christian virtues; so
that our institution embraces the whole philosophy of sentiment and the complete
theology of the heart. This is why one of our worshipful brothers [2] has said -
Free-Maçons, Illustre grand Maître,
Recevez mes premiers transports,
Dans mon coeur l'ordre les fait naître;
Heureux ! si de nobles efforts
Me font mériter votre estime,
M'élèvent à ce vrai sublime,
A la première vérité,
A l'essence pure et divine,
De l'âme céleste origine,
Source de vie et de clarté [2 bis].
Because a sad, savage, and misanthropic Philosophy disgusts virtuous men, our
ancestors, the Crusaders, wished to render it lovable by the attractions of
innocent pleasures, agreeable music, pure joy, and moderate gaiety. Our
festivals are not what the profane world and the ignorant vulgar imagine. All
the vices of heart and soul are banished there, and irreligion, libertinage,
incredulity, and debauch are proscribed. It is in that spirit that one of our
Poets [3] said :
Nous suivons aujourd'hui des sentiers peu battus,
Nous cherchons à bâtir, et tous nos édifices
Sont ou des cachots pour les vices,
Ou des temples pour les vertus.
Our banquets resemble those virtuous symposia of Horace, where the conversation
only touched what could enlighten the soul discipline the heart, and inspire a
taste for the true, the good, and the beautiful.
O! noctes, coenaeque Deum...
Sermo oritur non de regnis domibusque alienis;
...sed quod magis ad nos
Pertinet, et nescire malum est, agitamus; utrumne
Divitis homines, an sint virtute beati;
Quidve ad amicitias usus rectumve trahat nos,
Et quae sit natura boni, summumque quid ejus. [4]
Ici l'amour de tous les désirs se fortifie. Nous bannissons de nos Loges toute
dispute, qui pourrait altérer la tranquilité de l'esprit, la douceur des moeurs,
les sentimes de l'amitié, et cette harmonie parfaite qui ne se trouve que dans
le retranchement de tous les excès indécens, et de toutes les passions
discordantes.
Thus the obligations imposed upon you by the Order, are to protect your brothers
by your authority, to enlighten them by your knowledge, to edify them by your
virtues, to succour them in their necessities, to sacrifice all personal
resentment, and to strive after an that may contribute to the peace and unity of
society.
We have secrets; they are figurative signs and sacred words, composing a
language sometimes mute, sometimes very eloquent, in order to communicate with
one another at the greatest distance, and to recognise our brothers of
whatsoever tongue. These were words of war which the Crusaders gave each other
in order to guarantee them from the surprises of the Saracens, who often crept
in amongst them to kill them. These signs and words recall the remembrance
either of some part of our science, or of some moral virtue, or of some mystery
of the faith. That has happened to us which never befell any former Society. Our
Lodges have been established, and are spread in all civilised nations, and,
nevertheless, among this numerous multitude of men never has a brother betrayed
our secrets. Those natures most trivial, most indiscreet, least schooled to
silence, learn this great art on entering our Society. Such is the power over
all natures of the idea of a fraternal bond! This inviolable secret contributes
powerfully to unite the subjects of all nations, and to render the communication
of benefits easy and mutual between us. We have many examples in the annals of
our Order. Our brothers, travelling in divers lands, have only needed to make
themselves known in our Lodges in order to be there immediately overwhelmed by
all kinds of succour, even in time of the most bloody wars, and illustrious
prisoners have found brothers where they only expected to meet enemies. Should
any fail in the solemn promises which bind us, you know, gentlemen, that the
penalties which we impose upon him are remorse of conscience, shame at his
perfidy, and exclusion from our Society, according to those beautiful lines of
Horace -
Est et fideli tuta silentio
Merces; vetabo qui Cereris sacrum
Vulgarit arcanae, sub isdem
Sit tragibus, fragilemque mecum
Solvat phaselum;... [5]
Yes, sirs, the famous festivals of Ceres at Eleusis, of Isis in Egypt, of
Minerva at Athens, of Urania amongst the Phenicians, and of Diana in Scythia
were connected with ours. In those places mysteries were celebrated which
concealed many vestiges of the ancient religion of Noah and the Patriarchs. They
concluded with banquets and libations, and neither that intemperance nor excess
were known into which the heathen gradually fell. The source of these infamies
was the admission to the nocturnal assembIies of persons of both sexes in
contravention of the primitive usages. It is in order to prevent similar abuses
that women are excluded from our Order. We are not so unjust as to regard the
fair sex as incapable of keeping a secret. But their presence might insensibly
corrupt the purity of our maxims and manners.
Si le sexe est banni, qu'il n'en ait point d'alarmes,
Ce n'est point un outrage à sa fidélité;
Mais on craint que l'amour entrant avec ses charmes,
Ne produise l'oubli de la fraternité.
Noms de frère et d'ami seroient de faibles armes
Pour garantir les coeurs de la rivalité.
The fourth quality required in our Order is the taste for useful sciences and
the liberal arts. Thus, the Order exacts of each of you to contribute, by his
protection, liberality, or labour, to a vast work for which no academy can
suffice, because all these societies being composed of a very small number of
men, their work cannot embrace an object so extended.
All the Grand Masters in Germany, England, Italy, and elsewhere, exhort all the
learned men and all the artisans of the Fraternity to unite to furnish the
materials for a Universal Dictionary of the liberal arts and useful sciences,
excepting only theology and politics. The work has already been commenced in
London, and by means of the union of our brothers it may be carried to a
conclusion in a few years. Not only are technical words and their etymology
explained, but the history of each art and science, its principles and
operations, are described. By this means the lights of all nations will be
united in one single work, which will be a universal library of all that is
beautiful, great, luminous, solid, and useful in all the sciences and in all
noble arts. This work will augment in each century, according to the increase of
knowledge, and it will spread emulation and the taste for things of beauty and
utility over all of Europe.
Every family, every Republic, every Empire, of which the origin is lost in
obscure antiquity, has its fable and its truth, its legend and its history. Some
ascribe our institution to Solomon, some to Moses, some to Abraham, some to
Noah, and some to Enoch, who built the first city, or even to Adam. Without any
pretence of denying these origins, I pass on to matters less ancient. This,
then, is a part of what I have gathered in the annals of Great Britain, in the
Acts of Parliament, which speak often of our privileges, and in the living
traditions of the English people, which has been the centre of our Society since
the eleventh century.
At the time of the Crusades in Palestine many princes, lords, and citizens
associated themselves, and vowed to restore the Temple of the Christians in the
Holy Land, and to employ themselves in bringing back their architecture to its
first institution. They agreed upon several ancient signs and symbolic words
drawn from the well of religion in order to recognise themselves amongst the
heathen and Saracens. These signs and words were only communicated to those who
promised solemnly, and even sometimes at the foot of the altar, never to reveal
them. This sacred promise was therefore not an execrable oath, as it has been
called, but a respectable bond to unite Christians of all nationalities in one
confraternity. Some time afterwards our Order formed an intimate union with the
Knights of St John of Jerusalem. From that time our Lodges took the name of
Lodges of St John. This union was made after the example set by the Israelites
when they erected the second Temple, who whilst they handled the trowel and
mortar with one hand, in the other held the sword and buckler. Our Order
therefore must not be considered a revival of the Bacchanals, but as an order
founded in remote antiquity, and renewed in the Holy Land by our ancestors in
order to recall the memory of the most sublime truths amidst the pleasures of
society.
The kings, princes, and lords returned from Palestine to their own lands, and
there established divers Lodges. At the time of the last Crusades many Lodges
were already erected in Germany, Italy, Spain, France, and from thence in
Scotland, because of the close alliance between the French and the Scotch.
James, Lord Steward of Scotland, was Grand Master of a Lodge established at
Kilwinning, in the West of Scotland, MCCLXXXVI., (2) shortly after the death of
Alexander III., King of Scotland, and one year before John Baliol mounted the
throne. This lord received as Freemasons into his Lodge the Earls of Gloucester
and Ulster, the one English, the other Irish.
By degrees our Lodges and our rites were neglected in most places. This is why
of so many historians only those of Great Britain speak of our Order.
Nevertheless it preserved its splendour among those Scotsmen to whom the Kings
of France confided during many centuries the safeguard of their royal persons.
After the deplorable mishaps in the Crusades, the perishing of the Christian
armies, and the triumph of Bendocdar, Sultan of Egypt, during the eighth and
last Crusade, that great Prince Edward, son of Henry III., King of England,
seeing there was no longer any safety for his brethren in the Holy Land, from
whence the Christian troops were retiring, brought them all back, and this
colony of brothers was established in England. As this prince was endowed with
all heroic qualities, he loved the fine arts, declared himself protector of our
Order, conceded to it new privileges, and then the members of this fraternity
took the name of Freemasons, after the example set by their ancestors. Since
that time Great Britain became the seat of our Order, the conservator of our
laws, and the depository of our secrets. The fatal religious discords which
embarrassed and tore Europe in the sixteenth century caused our Order to
degenerate from the nobility of its origin. Many of our rites and usages which
were contrary to the prejudices of the times were changed, disguised,
suppressed.
Thus it was that many of our brothers forgot, like the ancient Jews, the spirit
of our laws, and only retained the letter and shell. The beginnings of a remedy
have already been made. It is only necessary to continue, and to at last bring
everything back to its original institution. This work cannot be difficult in a
State where religion and the, Government can only be favourable to our laws.
From the British Isles the Royal Art is now repassing into France, under the
reign of the most amiable of Kings, whose humanity animates all his virtues, and
under the ministry of a Mentor, who has realised all that could be imagined most
fabulous.
In this happy age when love of peace has become the virtue of heroes, this
nation one of the most spiritual of Europe, will become the centre of the Order.
She will clothe our work, our statutes, and our customs with grace, delicacy,
and good taste, essential qualities of the Order, of which the basis is the
wisdom, strength, and beauty of genius. It is in future in our Lodges, as it
were in public schools, that Frenchmen shall learn, without travelling, the
characters of all nations, and that strangers shall experience that France is
the home of all peoples. Patria gentis humano.
NOTES:
[1] To faithfully keep a promise, to honour the holiness of friendship
To love virtue, not its reward.
[2] the Count de Tressan.
[2 bis] Freemason, illustrious Grand Master,
Receive my first transports,
In my heart the Order has given them birth,
Happy I, if noble efforts
Cause me to merit your esteem
By elevating me to the sublime,
The primeval Truth,
To the Essence pure and divine,
The celestial Origin of the soul,
The Source of life and love.
[3] Procope, in "Apologie des Francs-Maçons".
[4] O nights, o divine repasts !
Without troubling ourselves with things that do not matter
But to dwell on those which concern us
... and it would be bad to ignore :
If wealth or virtue give happiness to Man
What use do friendship or virtue bring us
What is the nature of good, and what is the highest good.
Horace, Satire VI du Livre II
[5] Loyal silence is surely rewarded But he who reveals the sacred secret of
Ceres Him I will not allow to dwell under my roof Or to share my fragile skiff
Horace, Odes, Livre III